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« Penser & faire le design ! »

L’urgence d’une architecture durable et responsable pour demain

Photo : nouveau siège Christian Dior Parfums, interior design by Saguez & Partners.

C’est le travail du designer d’anticiper, de proposer et de voir à long terme pour répondre à des usages. Avec la Manufacture Design pour laboratoire et modèle clients, Jean-Philippe Cordina, associé, directeur de création, et Michaël Bezou, directeur de création, défendent leur vision durable de façon très concrète.

Quelle démarche dans la conception de vos aménagements intérieurs ?
JPC – Notre démarche est basée sur l’analyse des usages. Le design étant la méthode pour aboutir à des espaces fonctionnels, responsables, générateurs de liens sociaux, nous devons changer les manières de travailler, de se déplacer, de se rencontrer pour préserver notre environnement. D’ailleurs, notre champ d’action nous amène à travailler sur des sujets de mobilités propres – du TGV au tramway en passant par le RER – où nous imaginons des espaces intérieurs avec les mêmes qualités d’usages. Et nous pensons « espaces flexibles », pour accroître leur longévité et leur adaptabilité à différents scénarii au fil du temps.

MB – Nous travaillons beaucoup sur des réhabilitations de lieux. De fait, nous respectons toujours l’histoire du lieu, son contexte, son vécu. Il y a toujours un atout ou une force sur laquelle nous allons pouvoir nous appuyer. Dans les aménagements de bureaux, nous nous focalisons sur trois leviers forts : la lumière naturelle, l’acoustique et l’ergonomie. Nous enlevons tout le superflu pour nous concentrer sur un design utile. Et cela consiste plus souvent à retirer qu’à ajouter. Des plafonds ouverts avec un calepinage bien étudié permettent de gagner en hauteur sous plafond tout en utilisant moins de matière. Et avec les bons matériaux aux bons endroits, l’acoustique n’en est que plus performante. Dans nos projets, nous essayons toujours de faire entrer la nature dans le lieu. Pour cela, nous travaillons avec des personnes qui partagent notre amour des plantes, des spécialistes qui nous aident à trouver la solution appropriée aux contraintes de lieux en ville. Je pense notamment à Euroflor avec qui nous aménageons beaucoup d’espaces extérieurs comme intérieurs. Le végétal est souvent dans la genèse du projet, au cœur du master plan.

Quelle perception pour le bien-être physique et mental des individus ?
JPC – Pourquoi mettre le clos en opposition au positif et au durable ? L’espace intérieur, c’est le confort/réconfort, la chaleur humaine, le lien. C’est l’espace que l’on s’approprie et que l’on habite, c’est une part de soi. Penser à l’échelle humaine revient à légitimer le bien-être. Et à écouter, dialoguer, proposer pour faire évoluer les mentalités. Certes, le changement est anxiogène, mais il s’accompagne, car il est clair qu’on a tous conscience qu’il faut agir et vite !

MB – Bien circuler, mieux respirer, disposer de vues dégagées, d’accès à des terrasses… On a vu avec la crise sanitaire que nous traversons combien il est important de reconnecter les individus aux espaces extérieurs, vecteurs de lien social, de détente, d’inspiration et de respiration. À ce titre, nous privilégions aussi les zones d’échanges et les circulations naturelles, les escaliers plutôt que les ascenseurs, par exemple. Avec les entrées de lumière naturelle, ces zones s’avèrent un point essentiel dans l’étude de nos projets. L’espace intérieur est clos par définition, mais dans ses usages, il doit être connecté, ouvert sur les autres.

Quels matériaux, finitions et couleurs ?
JPC – Nous sommes très vigilants sur toute la chaîne de production, qu’il s’agisse de fabrication, d’aménagements ou de sourcing de mobilier. Nous veillons à ce que toute la chaîne soit propre, jusqu’au retraitement des emballages sur les chantiers. Cela demande un engagement commun et une totale transparence de nos partenaires. Tout matériau ayant une certification trouve sa place dans notre process de prescription et, par chance, toutes les couleurs sont dans la nature, ce qui nous donne beaucoup de liberté.

MB – Nous avons une vraie responsabilité dans nos choix, d’où la sélection de matériaux dont nous connaissons bien la provenance et le processus de fabrication. C’est important de savoir ce que l’on pose quand nous sommes sur des surfaces de sol dépassant parfois les 20 000 m2. Des bois 100 % français pour les parquets (Panaget), ou des dossiers de dalles en PET recyclées et fibres régénérées (Ege). Que le matériau soit conçu dans une approche de développement durable est le minimum, et si, en plus, il permet de connecter l’homme avec la nature, c’est encore mieux. À ce titre, nous venons de développer avec Ege une gamme de moquettes inspirées des couleurs et textures des arbres, feuilles, pierres. Elle permet d’amener les couleurs de la nature dans des environnements de bureaux souvent très blancs et froids. La nature est souvent la plus belle des inspirations !

Extrait du dossier spécial architecture intérieure et développement durable Architectures Cree, automne 2020.
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